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mardi 9 décembre 2014

La Laïcité ou vivre "comme si Dieu n'existait pas" !!!





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(Extrait) Message du Pape Benoît XVI pour la journée mondiale des
                                                                                   mission 2011 ⇝ 1

(Extrait) Discours du Pape Benoït XVI lors de la rencontre avec le
                                                    lergé du diocèse d'Aoste 2005 ⇝ 2

          "Avec la disparition de l’idée de Dieu disparaît aussi celle
                                   d’un monde vrai par Robert Spaemann ⇝ 3

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MESSAGE DU PAPE BENOÎT XVI
POUR LA JOURNÉE MONDIALE DES MISSIONS 2011


«Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie» (Jn 20,21)


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A tous
Ce devoir n'a rien perdu de son caractère urgent. Et même, «la mission du Christ Rédempteur, confiée à l'Eglise, est encore bien loin de son achèvement... Un regard d'ensemble porté sur l'humanité montre que cette mission en est encore à ses débuts et que nous devons nous engager de toutes nos forces à son service» (Jean-Paul II, EncycliqueRedemptoris missio, n. 1). Nous ne pouvons être tranquilles à la seule pensée que, après deux mille ans, il y a encore des peuples qui ne connaissent pas le Christ et n'ont pas encore entendu son message de salut.
Mais pas seulement; le nombre de ceux qui, bien qu'ayant reçu le message de l'Evangile, l'ont oublié et abandonné et ne se reconnaissent plus dans l'Eglise ne cesse de croître et de nombreux milieux, même dans des sociétés traditionnellement chrétiennes, sont aujourd'hui réticents à s'ouvrir à la parole de la foi. Un changement culturel est en marche, renforcé aussi par la mondialisation, des mouvements de pensée et le relativisme dominant, un changement qui conduit à une mentalité et à un style de vie qui ignorent le message évangélique, comme si Dieu n'existait pas, et qui encouragent la recherche du bien-être, du gain facile, de la carrière et du succès comme but de la vie, même au détriment des valeurs morales.Tous les peuples sont destinataires de l'annonce de l'Evangile. L'Eglise, «par nature est missionnaire, puisqu'elle-même tire son origine de la mission du Fils et de la mission du Saint-Esprit, selon le dessein de Dieu le Père (Concile oecuménique Vatican II, Ad gentes, n. 2). Telle est «la grâce et la vocation de l'Eglise, son identité la plus profonde. Elle existe pour évangéliser» (Paul VI, Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, n. 14). De ce fait, elle ne peut jamais se replier sur elle-même. Elle s'enracine dans des lieux déterminés pour aller au-delà. Son action, conformément à la parole du Christ et sous l'influence de sa grâce et de sa charité, se fait pleinement et réellement présente à tous les hommes et à tous les peuples pour les mener à la foi en Christ (cf. Ad gentes, n. 5).
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RENCONTRE AVEC LE CLERGÉ DU DIOCÈSE D'AOSTE

DISCOURS DU PAPE BENOÎT XVI

Eglise paroissiale d'Introd (Val d'Aoste)



Lundi 25 juillet 2005



........  J'ai été trop long. En ce qui concerne le deuxième point, même si ce n'est qu'en partie, il me semble l'avoir déjà abordé. C'est vrai: aux personnes, surtout aux responsables du monde, l'Eglise apparaît comme quelque chose de dépassé, et nos propositions comme n'étant pas nécessaires. Ils se comportent comme s'ils pouvaient, comme s'ils voulaient vivre sans notre parole et ils pensent toujours qu'ils n'ont pas besoin de nous. Ils ne cherchent pas notre parole.
Cela est vrai et nous fait souffrir, mais cela fait également partie de la situation historique d'une certaine vision anthropologique, selon laquelle l'homme doit faire les choses comme Karl Marx l'avait dit: l'Eglise a eu 1800 ans pour montrer qu'elle pouvait changer le monde et elle n'a rien fait, maintenant nous le ferons seuls.
Il s'agit d'une idée très répandue et également étayée par des philosophies; on comprend ainsi l'impression d'un aussi grand nombre de personnes pensant pouvoir vivre sans l'Eglise, qui apparaît comme quelque chose du passé. Mais il apparaît également toujours plus que seules les valeurs morales et les convictions fortes donnent la possibilité, même au prix de certains sacrifices, de vivre et de construire le monde. On ne peut pas construire de manière mécanique comme l'avait proposé Karl Marx avec la théorie du capital et de la propriété, etc.
S'il n'existe pas de forces morales dans les âmes, ni la disponibilité à souffrir également pour ces valeurs, on ne construit pas un monde meilleur, au contraire, le monde empire chaque jour, l'égoïsme domine et détruit tout. En voyant cela, on se pose à nouveau la question: mais d'où viennent les forces qui nous rendent capables de souffrir également pour le bien, de souffrir pour le bien qui me fait tout d'abord mal personnellement, qui n'a pas d'utilité immédiate? Où sont les ressources, les sources? D'où vient la force de promouvoir ces valeurs?
On voit que la moralité en tant que telle ne vit pas, n'est pas efficace si elle n'a pas un fondement plus profond dans des convictions qui donnent réellement des certitudes et qui donnent aussi la force de souffrir car, dans le même temps, elles font partie d'un amour, un amour qui grandit dans la souffrance et qui est la substance de la vie. A la fin, en effet, seul l'amour nous fait vivre et l'amour est toujours également souffrance: il mûrit dans la souffrance et donne la force de souffrir pour le bien sans tenir compte de sa propre personne en ce moment actuel.
Il me semble que cette conscience grandit, car on voit déjà les effets d'une condition où n'existent pas les forces qui proviennent d'un amour qui est la substance de ma vie et qui me donne la force de mener la lutte pour le bien. Ici aussi, nous avons naturellement besoin de patience, mais d'une patience active, au sens où il faut faire comprendre aux gens: vous avez besoin de cela.
Et même s'ils ne se convertissent pas tout de suite, ils s'approchent au moins du cercle de ceux qui, dans l'Eglise, ont cette force intérieure. L'Eglise a toujours eu en son sein ce groupe fort intérieurement, qui porte réellement la force de la foi, ainsi que des personnes qui en quelque sorte s'y accrochent, se laissent porter et participent ainsi.
Je pense à la parabole du Seigneur à propos du minuscule grain de sénevé qui devient ensuite un arbre si grand que même les oiseaux du ciel y trouvent refuge. Et je dirais que ces oiseaux peuvent représenter les personnes qui ne se convertissent pas encore, mais qui se posent au moins sur l'arbre de l'Eglise. J'ai fait cette réflexion: à l'époque des lumières, l'époque où la foi était divisée entre catholiques et protestants, on pensa qu'il fallait conserver les valeurs morales communes en leur donnant un fondement suffisant. On pensa: nous devons rendre les valeurs morales indépendantes des confessions religieuses, de façon à ce qu'elles existent "etsi Deus non daretur".Aujourd'hui, nous sommes dans la situation contraire, la situation s'est inversée. Les valeurs morales ne sont plus évidentes. Elles ne deviennent évidentes que si Dieu existe. J'ai donc suggéré que les laïcs, ceux que l'on appelle les laïcs, devraient réfléchir pour savoir si, pour eux, le contraire n'est pas valable aujourd'hui: nous devons vivre "quasi Deus daretur", même si nous n'avons pas la force de croire, nous devons vivre sur cette hypothèse, autrement, le monde ne fonctionne pas. Ce serait là, il me semble, un premier pas pour s'approcher de la foi. Et je vois lors de nombreuses rencontres que, grâce à Dieu, le dialogue avec une partie du monde laïc, au moins, se développe.....

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Un philosophe relance le pari du pape: vivre comme si Dieu existait

Cest l'Allemand Robert Spaemann, dans un livre sur la "rumeur immortelle", toujours vivante et toujours controversée, qu'est l'existence de Dieu. En arrière-plan, le conseil donné par Benoît XVI "y compris à nos amis incroyants"

par Sandro Magister



ROMA, le 31 octobre 2008 – Un livre vraiment important, déjà publié en Allemagne, sort ces jours-ci en Italie. Son auteur est un philosophe chrétien de première grandeur, Robert Spaemann (voir photo). Le titre italien est "La diceria immortale", le titre original allemand "Das unsterbliche Gerücht". Un titre que l’auteur explique de la manière suivante:
"Qu’il existe un être qui, dans notre langue, s’appelle 'Dieu', c’est une vieille rumeur que l’on n’arrive pas à réduire au silence. Cet être ne fait pas partie de ce qui existe dans le monde. Il devrait plutôt être la cause et l’origine de l’univers. Mais la rumeur indique que cette origine a laissé dans le monde des traces et des références. C’est la seule raison pour laquelle on peut faire des affirmations si diverses sur Dieu".
Le livre, édité en Italie par Cantagalli, est le premier d’une collection intitulée – pas par hasard – "Come se Dio fosse", comme si Dieu existait.

Vivre "comme si Dieu existait" – que l’on croie ou non en Lui – c’est la proposition paradoxale lancée par Benoît XVI à la culture et aux hommes d'aujourd’hui.

Cette proposition, Joseph Ratzinger l’a formulée pour la première fois, en théologien mais aussi en philosophe, dans son mémorable discours du 1er avril 2005 à Subiaco, dernière conférence publique avant d'être élu pape.

Voici comment il l’avait exposée:

"A l’époque des Lumières, on a tenté de comprendre et définir les normes morales essentielles en disant qu’elles seraient valables 'etsi Deus non daretur', même si Dieu n’existait pas. Face à l’opposition entre confessions et à la crise menaçante de l’image de Dieu, on a essayé de maintenir les valeurs essentielles de la morale hors des contradictions et de leur chercher une évidence qui les rende indépendantes des nombreuses divisions et incertitudes des diverses philosophies et confessions. C’est comme cela que l’on a voulu assurer les bases de la cohabitation et, plus généralement, celles de l’humanité. A cette époque, cela paraissait possible, dans la mesure où la plupart des grandes convictions de fond créées par le christianisme résistaient et semblaient indéniables. Mais il n’en est plus ainsi. La recherche d’une telle certitude rassurante, qui puisse rester incontestée au-delà de toutes les différences, a échoué. Même l’effort vraiment grandiose de Kant n’a pas pu créer la nécessaire certitude partagée. Kant avait nié que Dieu puisse être connaissable dans le cadre de la raison pure, tout en présentant Dieu, la liberté et l’immortalité comme des postulats de la raison pratique, sans laquelle, pour être cohérent, aucun comportement moral ne lui paraissait possible. La situation actuelle du monde ne nous fait-elle pas penser de nouveau qu’il pourrait avoir raison? Je voudrais le dire autrement: la tentative, portée à l’extrême, de modeler les choses humaines en faisant tout à fait abstraction de Dieu nous conduit de plus en plus au bord du gouffre, vers la mise de côté totale de l’homme. Il faudrait alors renverser l’axiome des philosophes des Lumières et dire: même ceux qui ne parviennent pas à trouver le chemin de l’acceptation de Dieu devraient en tout cas chercher à vivre et à mener leur vie 'veluti si Deus daretur', comme si Dieu existait. C’est le conseil que Pascal donnait déjà à ses amis incroyants; c’est celui que nous voudrions donner, aujourd’hui aussi, à nos amis incroyants. Ainsi personne n’est limité dans sa liberté, mais toutes nos affaires trouvent un soutien et un critère dont elles ont un besoin urgent".
Lu dans ce contexte, le livre de Spaemann est encore plus passionnant.
On en trouvera ci-dessous un échantillon, sous forme de passages liés entre eux, pris dans les pages 24 à 42 de l'édition italienne:


"Avec la disparition de l’idée de Dieu disparaît aussi celle d’un monde vrai" 

par Robert Spaemann 



L’histoire des arguments en faveur de l’existence de Dieu est immense. Il y a toujours eu des hommes qui ont cherché à s’assurer du bien-fondé de leur foi. [...] Les preuves classiques de l’existence de Dieu cherchaient à montrer qu’il est vrai que Dieu existe. Elles présupposaient que la vérité existe et que le monde est doté de structures compréhensibles, accessibles à la pensée, qui trouvent leur fondement dans l’origine divine du monde. Elle nous sont directement accessibles et donc capables de nous mener à ce fondement.

Ce présupposé est contesté à partir de Hume et surtout par Nietzsche. [...] L'œuvre entière de Nietzsche peut être lue comme une paraphrase de la formule lapidaire de Hume: " We never really advance a step beyond ourselves ", en réalité, jamais nous n’avançons d’un pas au-delà de nous-mêmes [...] Nietzsche écrit que "nous aussi, philosophes des Lumières, libres penseurs du XIXe siècle, nous empruntons encore notre feu à la foi chrétienne – qui fut aussi la foi de Platon – qui admettait que Dieu est la vérité et que la vérité est divine". Mais justement cette pensée est pour Nietzsche une auto-illusion. Il n’y a pas de vérité. Il n’y a que des réactions utiles ou nuisibles. "Nous ne devons pas nous imaginer que le monde nous montre un visage lisible", disent Michel Foucault et Richard Rorty. [...] Avec la disparition de l’idée de Dieu disparaît aussi celle d’un monde vrai. [...]

Le néo-pragmatiste Rorty remplace la connaissance par l’espérance d’un monde meilleur, où l’on ne peut même plus dire en quoi cette espérance devrait consister. [...] En conséquence de quoi Rorty n’accepte même plus le reproche de parler de façon obscure et contradictoire. En fait, dans le cadre d’une pensée qui se sent obligée non plus à la vérité mais au succès, on ne peut même plus dire clairement en quoi devrait consister ce succès. Des pensées obscures peuvent être plus efficaces que des pensées claires. La nouvelle situation est caractérisée par le fait que nous décidons "uno actu", par notre pure volonté, si nous devons penser un absolu, penser cet absolu comme Dieu, reconnaître quelque chose comme une vérité non relative à nous-mêmes; et enfin si nous devons nous considérer comme autorisés à nous percevoir en tant qu’êtres capables de vérité, autrement dit en tant que personnes. [...]

Chez Nietzsche la "voie moderne", c’est-à-dire le nominalisme, parvient à la plénitude et à la pleine conscience de soi. [...] Donc dans cette situation, les arguments pour penser l’absolu comme Dieu ne peuvent être que des arguments "ad hominem". [...] Si nous ne le voulons pas, il n’y a aucun argument qui puisse nous convaincre de l’existence de Dieu. [...]

Lorsque la pensée de la vérité disparaît celle de la réalité disparaît aussi. Quand on dit et pense ce qui est, c’est structuré d’une manière inévitablement temporelle. On ne peut pas penser quelque chose comme réel sans le penser dans le présent, c’est-à-dire comme réel "maintenant". Quelque chose qui n’a jamais été que passé ou qui ne sera que futur, ça n’a jamais existé et ça n’existera jamais. Ce qui est maintenant a été futur avant et sera passé ensuite. Le "futurum exactum", le futur antérieur, est inséparable du présent. Dire d’un événement actuel que dans l’avenir il n’aura plus eu lieu, revient à dire que, en réalité, il n’a même pas lieu maintenant. En ce sens tout le réel est éternel. Il ne pourra pas y avoir un moment où il ne sera plus vrai que quelqu’un a ressenti une douleur ou une joie qu’il ressent maintenant. Et cette réalité passée fait absolument abstraction du fait que nous nous en souvenons.
Mais quel est le statut ontologique de cette transformation en passé si toutes les traces sont effacées, s’il ne doit plus y avoir d’univers? Le passé est toujours le passé d’un présent; qu’en sera-t-il du passé s’il n’y a plus aucun présent? L’inévitabilité du "futurum exactum" implique donc l’inévitabilité de penser un "lieu" où tout ce qui arrive est conservé pour toujours. Sans quoi il faudrait accepter l’idée absurde que, un jour, ce qui est maintenant n’aura plus été; et par conséquent le présent lui-même n’est pas réel: une pensée que seul le bouddhisme tend à soutenir. La conséquence du bouddhisme est la négation de la vie.

Nietzsche a réfléchi comme personne avant lui aux conséquences de l’athéisme, avec l'intention de parcourir non pas la route de la négation de la vie, mais celle de l’affirmation de la vie. [...] La conséquence la plus catastrophique lui semblait être que l’homme perde ce à quoi tend son auto-transcendance. En fait, Nietzsche considérait que le plus grand acquis du christianisme était qu’il enseignait l’amour de l’homme par amour de Dieu: "le sentiment le plus noble et le plus haut que les hommes aient atteint jusqu’à présent". Le surhomme et l’idée d’un éternel retour se substituaient à l’idée de Dieu. En fait, Nietzsche voyait avec clarté qui, sinon, déterminerait à l’avenir le visage de la terre: les "derniers hommes", qui croient avoir inventé le bonheur et se moquent de l’"amour", de la "création", de la "nostalgie" et de l’"étoile". Uniquement occupés à manigancer leur luxure, ils considèrent comme un fou tout dissident qui tient sérieusement à quelque chose, comme par exemple à la "vérité".

L’héroïque nihilisme de Nietzsche s’est montré impuissant, comme il le craignait lui-même, face aux "derniers hommes". [...] Le nihilisme banal du dernier homme est aujourd’hui propagé, entre autres, par Richard Rorty. L’homme qui a abandonné la vérité en même temps que l’idée de Dieu ne connaît plus maintenant que ses propres états subjectifs. Son rapport avec la réalité n’est pas représentatif, mais seulement causal. Il veut se concevoir lui-même comme une bête rusée. A une bête de ce genre on ne donne pas la connaissance de Dieu. [...]

Mais si nous voulons penser le réel comme réel, nous devons penser Dieu. "Je crains que nous ne puissions nous libérer de Dieu tant que nous croirons à la grammaire", écrit Nietzsche. Il aurait aussi pu ajouter: "... tant que nous continuerons à nous penser comme réels". Un argument "ad hominem". 

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Erbilight (Visite du Cardinal Barbarin et délégation à Erbil (Irak) Decembre 2014)
                        + réactions et décryptage (25 nov 2014)

Veilleurs: "Cathos et rebelles" ( via Le Figaro 18 Avril 2014)
"Les Veilleurs" (20 Avril 2013)
Proclamation de St Thomas More comme patron des responsables 
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Halte au narcissisme du corps avec Adèle van Reeth
"Le droit canonique est un droit de guérison"(L'Eglise : une institution juridique ? )


Cardinal André XXIII - Extrait " Vision actuelle sur la Laïcité (KTO) "
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie I)
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie II)
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie III)
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie IV)

"La révolte des masses" - d' Ortega Y Gasset
Adieu Benoît XVI - Livre d' Or (ici)
Dans les combats, "Mes Armes" - faisons les nôtres ... (Ste Thérèse de l' enfant Jésus)
"DIVINI ILLIUS MAGISTRI" LETTRE ENCYCLIQUE DE SA SAINTETÉ
LE PAPE PIE XI SUR L'ÉDUCATION CHRÉTIENNE DE LA JEUNESSE
(Observatoire Sociopolitique du diocèse de Fréjus-Toulon)
"Notre République" par Charles Vaugirard










lundi 10 novembre 2014

"La renonciation à la vérité est mortelle pour la foi" par Benoît XVI


Benoît XVI : « La renonciation à la vérité est mortelle pour la foi »




        Je voudrais, en premier lieu, adresser mes remerciements les plus chaleureux à M. le recteur et aux autorités académiques de l’Université Pontificale Urbanienne, aux responsables administratifs et aux représentants des étudiants, pour leur proposition de donner mon nom à l’amphithéâtre qui vient d’être remis à neuf. Je voudrais remercier de manière tout à fait particulière le cardinal Fernando Filoni, grand chancelier de cette Université, qui a accueilli favorablement cette initiative. C’est pour moi un motif de grande joie que de pouvoir être ainsi associé de manière permanente aux travaux de l’Université Pontificale Urbanienne.

Au cours des différentes visites que j’ai eu l’occasion d’y faire à l’époque où j’étais préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi, j’ai été à chaque fois frappé par l’atmosphère d’universalité que l’on perçoit dans cette université, où des jeunes gens provenant de pratiquement tous les pays de la Terre se préparent pour servir l’Évangile dans le monde actuel. Aujourd’hui aussi, en moi-même, je vois face à moi, dans cet amphithéâtre, une communauté constituée d’un très grand nombre de jeunes gens, qui nous font percevoir de manière vivante l’extraordinaire réalité de l’Église catholique.

“Catholique” : cette définition de l’Église, qui fait partie de la profession de foi depuis les temps les plus anciens, porte en elle-même quelque chose de la Pentecôte. Elle nous rappelle que l’Église de Jésus-Christ n’a jamais concerné un peuple seulement ou une culture seulement, mais que, depuis les origines, elle était destinée à l’humanité. Les derniers mots que Jésus ait adressés à ses disciples ont été : “De toutes les nations faites mes disciples” (Mt 28, 19). Et, au moment de la Pentecôte, les apôtres ont parlé toutes les langues, ce qui leur a permis de manifester, grâce à la force du Saint-Esprit, toute l’ampleur de leur foi.

À partir de ce moment-là, l’Église s’est véritablement développée sur tous les continents. Votre présence, chères étudiantes et chers étudiants, est un reflet du visage universel de l’Église. Le prophète Zacharie avait annoncé un royaume messianique qui s’étendrait d’une mer à l’autre et qui serait un royaume en paix (Za 9, 9s.). Et en effet, dans tous les endroits où l’Eucharistie est célébrée et où les hommes ne forment plus entre eux, à partir du Seigneur, qu’un seul corps, il y a quelque chose de cette paix que Jésus-Christ avait promis de donner à ses disciples. Vous, chers amis, soyez des artisans de cette paix que, dans un monde déchiré et violent, il devient de plus en plus urgent de construire et de protéger. C’est pour cette raison que le travail de votre université, dans laquelle vous voulez apprendre à connaître Jésus-Christ de plus près afin de pouvoir devenir ses témoins, est tellement important.

Le Seigneur ressuscité a chargé ses apôtres - et à travers eux ses disciples de toutes les époques - de faire connaître sa parole jusqu’aux extrémités de la terre et de faire de tous les hommes ses disciples. Le concile Vatican II, en reprenant dans le décret “Ad gentes” une tradition constante, a mis en lumière les raisons profondes de cet envoi en mission et c’est avec une force renouvelée qu’il l’a ainsi assigné à l’Église d’aujourd’hui.

Mais, aujourd’hui, il y a beaucoup de gens qui se demandent, à l’intérieur de l’Église comme à l’extérieur, si cet envoi a encore de la valeur actuellement. La mission est-elle encore véritablement un caractère d’actualité ? Est-ce qu’il ne serait pas plus approprié de se rencontrer dans le dialogue entre les religions et de servir ensemble la cause de la paix dans le monde ? La contre-question est la suivante : le dialogue peut-il remplacer la mission ? Aujourd’hui, en effet, il y a un grand nombre de gens qui pensent que les religions devraient se respecter mutuellement et qu’elles devraient, en dialoguant entre elles, devenir une force commune de paix. Dans cette manière de penser, un présupposé que l’on rencontre dans la plupart des cas est que les différentes religions constituent des variantes d’une seule et même réalité ; que “religion” est le genre commun, qui prend des formes différentes en fonction des différentes cultures, mais qui exprime en tout cas une même réalité. La question de la vérité, qui à l’origine préoccupait les chrétiens plus que tout le reste, est dans ce cas-là mise entre parenthèses. On présuppose que l’authentique vérité en ce qui concerne Dieu est, en dernière analyse, impossible à atteindre et que, tout au plus, on ne peut rendre présent ce qui est ineffable qu’en recourant à des symboles variés. Cette renonciation à la vérité semble réaliste et utile à la paix entre les religions du monde.

Et cependant elle est mortelle pour la foi. En effet, la foi perd son caractère contraignant et sérieux si tout se réduit à des symboles qui, au fond, sont interchangeables et ne peuvent renvoyer que de loin à l’inaccessible mystère du divin.

Chers amis, vous voyez que le problème de la mission nous place non seulement face aux questions fondamentales de la foi mais également face à la question de savoir ce qu’est l’homme. Dans le cadre de cette brève allocution, je ne peux évidemment pas essayer d’analyser de manière exhaustive cette problématique qui, aujourd’hui, nous concerne tous profondément. Mais en tout cas je voudrais au moins faire allusion à la direction que devrait prendre notre pensée. Je le fais à partir de deux points de départ différents.

I


1. L’opinion commune est que les religions sont, pour ainsi dire, placées les unes à côté des autres, comme les continents et les différents pays le sont sur une carte géographique. Mais ce n’est pas exact. Les religions sont en mouvement au niveau historique, comme le sont les peuples et les cultures. Il existe des religions qui sont en attente. Les religions tribales sont de ce type : elles ont leur moment historique et pourtant elles sont en attente d’une rencontre plus élevée qui les conduise à la plénitude.

Nous, en tant que chrétiens, nous sommes convaincus que, de manière silencieuse, elles attendent la rencontre avec Jésus-Christ, la lumière qui provient de lui et qui, seule, peut les conduire complètement à leur vérité. Et le Christ les attend. Leur rencontre avec lui n’est pas l’irruption d’un étranger qui détruit leur culture et leur histoire. C’est, au contraire, l’entrée dans quelque chose de plus grand vers quoi elles sont en marche. C’est pour cela que cette rencontre est toujours, à un moment donné, une purification et un mûrissement. D’autre part, la rencontre est toujours quelque chose de réciproque. Le Christ attend leur histoire, leur sagesse, leur vision des choses.

Aujourd’hui nous découvrons également, de manière de plus en plus nette, un autre aspect : tandis que dans les pays où s’est construite sa grande Histoire, le christianisme s’est, à bien des points de vue, fatigué et où certaines branches du grande arbre issu du grain de sénevé dont parle l’Évangile se sont desséchées et tombent à terre, une nouvelle vie naît de la rencontre des religions en attente avec le Christ. Là où il n’y avait que de la fatigue, de nouvelles dimensions de la foi se manifestent et apportent de la joie.

2. La religion, en soi, n’est pas un phénomène unitaire. Il faut toujours y distinguer plusieurs dimensions. D’une part il y a la grandeur de la tension vers le Dieu éternel, au-delà du monde. Mais, d’autre part, on y trouve des éléments qui sont nés de l’histoire des hommes et de leur pratique de la religion. Parmi ces éléments, on peut certainement découvrir des choses qui sont belles et nobles, mais également d’autres choses qui sont basses et destructrices, lorsque l’égoïsme de l’homme s’est emparé de la religion et que, au lieu d’en faire une ouverture, il l’a transformée en une fermeture à l’intérieur de son propre espace.

Voilà pourquoi la religion n’est jamais simplement un phénomène uniquement positif ou uniquement négatif : les deux aspects y sont mélangés. À ses débuts, la mission chrétienne a surtout perçu de manière très forte les éléments négatifs des religions païennes auxquelles elle était confrontée. C’est pour cette raison que l’annonce chrétienne a été, dans un premier temps, extrêmement critique à l’égard de la religion. Ce n’est qu’en dépassant leurs traditions, qu’elle considérait en partie comme étant même démoniaques, que la foi a pu développer sa force rénovatrice. Sur la base d’éléments de ce genre, le théologien évangélique Karl Barth a mis en opposition la religion et la foi, portant un jugement absolument négatif sur la première, perçue comme comportement arbitraire de l’homme qui tente, à partir de lui-même, de saisir Dieu. Dietrich Bonhoeffer a repris cette manière de voir, en se prononçant en faveur d’un christianisme “sans religion”. Il s’agit indubitablement d’une vision unilatérale qui ne peut être acceptée. Et cependant il est correct d’affirmer que toute religion, pour rester dans ce qui est juste, doit aussi, en même temps, se montrer toujours critique vis-à-vis de la religion. Il est clair que cela s’applique, dès ses débuts et en raison de sa nature, à la foi chrétienne, qui, d’une part, considère avec beaucoup de respect la profonde attente et la profonde richesse des religions, mais, d’autre part, considère également de manière critique ce qui est négatif. Il va de soi que la foi chrétienne doit sans cesse développer cette force critique, y compris à l’égard de sa propre histoire religieuse.

Pour nous, les chrétiens, Jésus-Christ est le Logos de Dieu, la lumière qui nous aide à établir une distinction entre la nature de la religion et la distorsion dont elle fait l’objet.

3. À notre époque, on entend avec de plus en plus de force la voix de ceux qui veulent nous convaincre que la religion en tant que telle est dépassée. C’est la raison critique qui devrait, seule, orienter l’action de l’homme. Derrière de telles idées, on trouve la conviction que, à travers la pensée positiviste, la raison dans toute sa pureté a définitivement pris le dessus. En réalité, cette manière de penser et de vivre est, elle aussi, conditionnée historiquement et liée à des cultures historiques déterminées. La considérer comme la seule valable, ce serait diminuer l’homme, en lui retirant des dimensions essentielles de son existence. L’homme devient plus petit, et non pas plus grand, lorsqu’il n’y a plus de place pour un ethos qui, sur la base de sa nature authentique, renvoie au-delà du pragmatisme, lorsqu’il n’y a plus d’espace pour le regard tourné vers Dieu. Le domaine propre de la raison positiviste se trouve dans les grands champs d’action de la technique et de l’économie, et cependant elle n’épuise pas tout l’humain. Par conséquent, c’est à nous, les croyants, qu’il revient de rouvrir sans cesse les portes qui, au-delà de la simple technique et du pur pragmatisme, conduisent à toute la grandeur de notre existence, à la rencontre avec le Dieu vivant.

II


1. Ces réflexions, qui sont peut-être un peu difficiles, devraient montrer que même aujourd’hui, dans un monde qui a été profondément transformé, la mission de faire connaître aux autres hommes l’Évangile de Jésus-Christ reste quelque chose de raisonnable.

Et cependant il y a également une seconde manière, plus simple, de justifier cette mission à notre époque. La joie exige d’être communiquée. L’amour exige d’être communiqué. La vérité exige d’être communiquée. Celui qui a reçu une grande joie ne peut pas la conserver simplement pour lui-même, il doit la transmettre. On peut dire la même chose pour le don de l’amour, pour le don de reconnaître la vérité qui se manifeste.

Lorsqu’André a rencontré le Christ, il n’a pas pu faire autrement que de dire à son frère : “Nous avons trouvé le Messie” (Jn 1,41). Et Philippe, à qui il a été donné de faire une rencontre semblable, n’a pas pu faire autrement que de dire à Nathanaël qu’il avait trouvé celui dont avaient parlé Moïse et les prophètes (Jn 1,45). Si nous annonçons Jésus-Christ, ce n’est pas pour que notre communauté compte le plus grand nombre possible de membres ; et encore moins pour le pouvoir. Nous parlons de Lui parce que nous sentons que nous avons le devoir de transmettre cette joie qui nous a été donnée.

Nous serons des annonciateurs crédibles de Jésus-Christ lorsque nous l’aurons véritablement rencontré au plus profond de la notre existence, lorsque, à travers notre rencontre avec Lui, la grande expérience de la vérité, de l’amour et de la joie nous aura été donnée.

2. La profonde tension entre l’offrande mystique à Dieu, dans laquelle on se donne totalement à lui, et la responsabilité envers le prochain et envers le monde qu’il a créé fait partie de la nature de la religion. Marthe et Marie sont toujours indissociables, même si, d’une fois à l’autre, l’accent peut être mis plutôt sur l’une ou plutôt sur l’autre. Le point de rencontre entre les deux pôles est l’amour, dans lequel nous touchons à la fois Dieu et ses créatures. “Nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous et nous y avons cru” (1 Jn 4,16) : cette phrase exprime la nature authentique du christianisme. L’amour, qui se réalise et se reflète sous des formes multiples dans les saints de tous les temps, est la preuve authentique de la vérité du christianisme.

Benoît XVI

21 octobre 2014

source: chiesa espresso republica

autre: À Rome, un Forum catholico-musulman sur l’éducation et la violence (La croix 10/nov/2014)


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(suite)

La "Evangelii gaudium" du pape émérite Benoît

Ratzinger a de nouveau rompu le silence. Afin d’avertir qu’un dialogue qui renoncerait à la vérité "est mortel" pour la propagation de la foi chrétienne. Et donc aussi pour la diffusion de cette "joie de l’Évangile" qui figure dans le programme du pape François

par Sandro Magister




ROME, le 28 octobre 2014 – "Il est discret, humble, il ne veut pas déranger", a déclaré le pape François à propos de son prédécesseur. "Il me donne l’impression d’avoir mon grand-père à la maison, à cause de sa sagesse. Cela me fait du bien de l’écouter. Et puis il m’encourage beaucoup".

Il arrive quelquefois que le pape émérite Benoît XVI – depuis sa résidence "de moine cloîtré", comme il aime à le dire – fasse parvenir au pape régnant des notes dans lesquelles il lui propose et lui demande une opinion. C’est ce qui s’est passé, par exemple, à la suite de la publication, au mois de septembre 2013, de l'interview que François avait accordée à la revue "La Civiltà Cattolica". On ne sait pas ce que Joseph Ratzinger a dit dans les quatre pages de commentaire qu’il a rédigées. Les relations entre les deux papes, le régnant e et l'émérite, sont placées sous le sceau du secret.

Dans certaines occasions, cependant, Benoît XVI rompt le silence et il dit de manière publique ce qu’il pense, avec la clarté et la liberté qui lui sont propres, sans craindre d’aller à contre-courant.

C’est ce qu’il a fait, par exemple, au mois de mars dernier, à travers un livre à auteurs multiples consacré à Jean-Paul II. Il y a mis en évidence les éléments de ce pontificat qu’il "est nécessaire d’étudier et d’assimiler" aujourd’hui encore : en particulier l'encyclique "Veritatis splendor" de 1993 consacrée aux problèmes moraux et la déclaration "Dominus Jesus" de 2000 relative aux "éléments non négociables de la foi catholique", c’est-à-dire les documents-clés les plus négligés et les plus critiqués de ce pontificat :

> Le pape émérite prie, mais il conseille aussi. Voici comment

Par ailleurs, ces jours derniers, Benoît XVI est encore intervenu en trois occasions, à travers le même nombre d’écrits.

Deux sont très brefs et sous forme de lettre. Le troisième est plus développé et sous forme de message.

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Le premier texte, daté du 10 octobre, est une lettre adressée au Comité International "Summorum Pontificum". Celui-ci a organisé à Rome une rencontre qui comportera la célébration de messes selon l’ancien rite par les cardinaux Raymond L. Burke, Walter Brandmüller et George Pell :

> The Message...

Dans cette lettre, Ratzinger se dit "heureux" que ce rite "vive maintenant dans la pleine paix de l’Église, y compris parmi les jeunes, et qu’il soit soutenu et célébré par de grands cardinaux".

Il qualifie donc également de "grand" ce cardinal Burke à qui le pape François refuse à la fois un rôle à la curie et la direction d’un diocèse.

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Le second texte, qui est daté du 4 août mais a été rendu public le 23 octobre, est une lettre adressée à la Fondation vaticane Joseph Ratzinger-Benoît XVI, à l’occasion d’un colloque organisé par celle-ci à Medellin, en Colombie, sur le thème "Le respect de la vie, chemin pour la paix":

> I saluti...

Dans cette lettre, le pape émérite indique justement comme élément fondamental pour la paix "le respect inconditionnel de la vie de l’homme, créé à l'image de Dieu et par conséquent doté d’une dignité absolue". Pour cette raison "le thème de la paix et le thème du respect de la vie humaine sont liés à la foi en Dieu créateur en tant que véritable garantie de notre dignité".

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La troisième intervention, enfin, a comme point de départ la décision qu’a prise l’Université Pontificale Urbanienne de donner à son amphithéâtre le nom de Benoît XVI.

Le message rédigé par Ratzinger pour cette occasion a été lu au cours de la cérémonie, qui a eu lieu le 21 octobre.

Un point étrange, toutefois, est que ce message n’a pas été mis en ligne sur le site web de l'Université Pontificale Urbanienne ; quant à "L'Osservatore Romano", il n’en a parlé que de manière sommaire. C’est l'agence de presse catholique autrichienne Kath.Net qui en a publié le texte intégral en italien, le 23 octobre, avec l’autorisation de l'auteur :

> La verità della religione e la vera religione


L'Université Pontificale Urbanienne est l'université missionnaire par excellence ; elle est liée à la congrégation pour l’évangélisation des peuples.

Et c’est précisément sur ce point que le pape émérite a pris appui pour réagir aux doutes qui, aujourd’hui, menacent l'idée même de la mission "ad gentes" que beaucoup de gens voudraient remplacer par un dialogue paritaire entre les religions en vue d’"une force commune de paix".

Mais si l’on fait cela – écrit Ratzinger – on laisse de côté "la vérité qui, à l’origine, a incité les chrétiens" à prêcher l’Évangile jusqu’aux extrémités de la terre :

"On présuppose que l’authentique vérité en ce qui concerne Dieu est, en dernière analyse, impossible à atteindre et que, tout au plus, on ne peut rendre présent ce qui est ineffable qu’en recourant à des symboles variés. Cette renonciation à la vérité semble réaliste et utile à la paix entre les religions du monde. Et cependant elle est mortelle pour la foi. En effet, la foi perd son caractère contraignant et sérieux si tout se réduit à des symboles qui, au fond, sont interchangeables et ne peuvent renvoyer que de loin à l’inaccessible mystère du divin".

Le pape émérite ne la cite pas de manière explicite, mais on voit également réapparaître ici, en arrière-plan, un renvoi à la déclaration "Dominus Jesus", contre laquelle se déchaînèrent des critiques qui venaient non seulement de personnes extérieures à l’Église catholique mais également de représentants de la haute hiérarchie tels que le cardinal Edward Cassidy, qui était à cette époque-là le président du conseil pontifical pour l'unité des chrétiens, et son successeur Walter Kasper, qui est aujourd’hui devenu le théologien préféré du pape François.

Lorsqu’on lit ce texte de Benoît XVI, il est difficile de ne pas penser à cette boutade de Bergoglio contre le prosélytisme, liquidé par lui comme étant une "solennelle sottise" à l’occasion de son premier entretien avec l’athée Eugenio Scalfari. Mais dans le langage de François, on le sait, le prosélytisme est une falsification de la mission chrétienne authentique, celle qui s’accomplit "par attraction" ; celle-là, au contraire, est indiscutablement au cœur de son pontificat, comme de celui de son prédécesseur.

En réalité, pour peu que l’on veuille bien lire avec un regard sans préjugés ce captivant message ratzingérien, on y trouverait non pas une opposition mais une adhésion – même si celle-ci est s’appuie sur des raisons originales – au programme du pontificat de François, à sa vision de l’Église "qui sort".

" Celui qui a reçu une grande joie ne peut pas la conserver simplement pour lui-même, il doit la transmettre", écrit Ratzinger. Qui affirme aussi :

"Si nous annonçons Jésus-Christ, ce n’est pas pour que notre communauté compte le plus grand nombre possible de membres ; et encore moins pour le pouvoir. Nous parlons de Lui parce que nous sentons que nous avons le devoir de transmettre cette joie qui nous a été donnée".

C’est l’exhortation apostolique "Evangelii gaudium" du pape François commentée par son prédécesseur. Où la joie ne fait qu’un avec l'amour et, en définitive, avec la vérité :

"Nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous et nous y avons cru” (1 Jn 4,16) : cette phrase exprime la nature authentique du christianisme. L’amour, qui se réalise et se reflète sous des formes multiples dans les saints de tous les temps, est la preuve authentique de la vérité du christianisme".

C’est ainsi que s’achève le message de Benoît XVI, reproduit intégralement ci-dessus.




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"La renonciation à la vérité est mortelle pour la foi"  par Benoît XVI
"Dagerman l’inconsolable (soixantenaire de sa disparition)" @JosephGynt @cahierslibres @TdCfr
"Jeunesse Lumière à 30 ans" JL30 avec le Père Daniel Ange 
La France est-elle encore la « fille aînée de l’Eglise » ? Par le cardinal Philippe Barbarin
Spiritualité conjugale selon Jean Paul II - 1/2 - "Le rêve de Dieu par Yves Semens"
Spiritualité conjugale selon Jean Paul II - 2/2 - "Une spiritualité conjugale"
Lettre de Mgr Aillet (MANIFPOURTOUS , Bioéthique , Gender , Euthanasie Morale Laïcque...)
Homélie de Mgr Marc Aillet à Notre Dame de Chartres (clôture du pèlerinage)
Dominique Humbrecht : " À défaut d'avoir précédé, nous (L'Église de France) 
pouvons encore suivre. Nous sommes acculés à l'exemplarité culturelle."
Veilleurs: "Cathos et rebelles" ( via Le Figaro 18 Avril 2014)
"Les Veilleurs" (20 Avril 2013)
Proclamation de St Thomas More comme patron des responsables 
de gouvernement et des hommes politiques
Loi naturelle et loi civile: 1-"un mariage de raison"
"1984" de George Orwell avec Raphaël Enthoven dans"Le Gai Savoir
Halte au narcissisme du corps avec Adèle van Reeth
Les nouvelles technologies vont-elles réinventer l' homme ?
"Le droit canonique est un droit de guérison"(L'Eglise : une institution juridique ? )
La liberté religieuse en cause en Europe
La voix éloquente et claire de la Conscience
Conscience morale: "Les chrétiens au risque de l'abstention ? "
La liberté de conscience et religieuse menacée aux États-Unis


Cardinal André XXIII - Extrait " Vision actuelle sur la Laïcité (KTO) "
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie I)
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie II)
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie III)
( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie IV)

La laïcité à la française " une analyse de Mgr Jean-Louis Bruguès
La voix éloquente et claire de la Conscience
"La révolte des masses" - d' Ortega Y Gasset
Quand l' Eglise interpelle les consciences....pour 2012
Adieu Benoît XVI - Livre d' Or (ici)
Spiritualité conjugale selon Jean Paul II - 1/2 - Le rêve de Dieu par Yves Semens
Démocratie "entre" Loi civil et loi morale - Extrait de l' Evangile de la Vie (Evangelium vitae)
Inauguration de la statue de Jean-Paul II par Monsieur le Sénateur Gérard COLLOMB
Dans les combats, "Mes Armes" - faisons les nôtres ... (Ste Thérèse de l' enfant Jésus)
"DIVINI ILLIUS MAGISTRI" LETTRE ENCYCLIQUE DE SA SAINTETÉ
LE PAPE PIE XI SUR L'ÉDUCATION CHRÉTIENNE DE LA JEUNESSE
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(Observatoire Sociopolitique du diocèse de Fréjus-Toulon)
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L' état doit il avoir une éthique ? La loi est elle pédagogique et donc
oriente elle vers le bien ?
Démocratie "entre" Loi civil et loi morale
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Chronique libre: "De l'ordre moral à l'ordre infernal"
Conscience morale: "Les chrétiens au risque de l'abstention ? "
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dimanche 17 août 2014

"Foi, Raison et Université: souvenirs et réflexions" - Dicours de Ratisbonne du Pape Benoit XVI (2006)





  • "Dicours de Ratisbonne du Pape Benoit XVI"
 suivi de la:
  1. "DÉCLARATION DU CARDINAL TARCISIO BERTONE, SECRETAIRE D'ETAT"
  2. Benoit XVI au Palais apostolique de Castelgandolfo le Dimanche 17 septembre 2006
  3. Benoit XVI lors de l'AUDIENCE GÉNÉRALE du Mercredi 20 septembre 2006

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VOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE BENOÎT XVI
À MUNICH, ALTÖTTING ET RATISBONNE
(9-14 SEPTEMBRE 2006)

RENCONTRE AVEC LES REPRÉSENTANTS DU MONDE DES SCIENCES

DISCOURS DU SAINT-PÈRE

Grand Amphithéâtre de l'Université de Ratisbonne
Mardi 12 septembre 2006

Foi, Raison et Université:
souvenirs et réflexionsEminences, Messieurs les Recteurs, Excellences,
Mesdames, Messieurs!

C'est pour moi un moment émouvant que de me retrouver encore une fois à l'université et de pouvoir de nouveau donner une conférence. Mes pensées me ramènent aux années durant lesquelles, après une belle période à l'Institut supérieur de Freising, j'ai commencé mon activité académique comme enseignant à l'université de Bonn. C'était encore le temps – en 1959 – de l’ancienne université des professeurs ordinaires. Les différentes chaires n'avaient ni assistants ni secrétaires propres, mais, en revanche, il y avait un contact très direct avec les étudiants et surtout aussi entre les professeurs. Dans les salles des professeurs, on se rencontrait avant et après les cours. Les contacts avec les historiens, les philosophes, les philologues et naturellement entre les deux facultés de théologie étaient très vivants. Chaque semestre avait lieu ce qu'on appelait le dies academicus, au cours duquel des professeurs de toutes les facultés se présentaient aux étudiants de l'ensemble de l'université. Cela rendait possible une expérience d'Universitas, à laquelle, Monsieur le Recteur magnifique, vous venez précisément de faire allusion. Malgré toutes les spécialisations, qui nous rendent parfois incapables de communiquer les uns avec les autres, nous faisions l'expérience de former cependant un tout et qu'en tout nous travaillions avec la même raison dans toutes ses dimensions, en ayant le sentiment d'assumer une commune responsabilité du juste usage de la raison ; voilà ce que nous pouvions vivre. Sans aucun doute, l'Université était aussi très fière de ses deux facultés de théologie. Il était clair qu'elles aussi, en s'interrogeant sur la raison de la foi, accomplissaient un travail qui appartient nécessairement au tout de l'Universitas scientiarum, même si tous pouvaient ne pas partager la foi, dont la corrélation avec la raison commune est le travail des théologiens. Cette cohésion interne dans l'univers de la raison n'a pas même été troublée quand on entendit, un jour, un de nos collègues déclarer qu'il y avait, dans notre université, une curiosité : deux facultés s'occupaient de quelque chose qui n'existait même pas – de Dieu. Il s'avérait indiscutable dans l'ensemble de l'Université que, même devant un scepticisme aussi radical, il demeurait nécessaire et raisonnable de s'interroger sur Dieu au moyen de la raison et de le faire en relation avec la tradition de la foi chrétienne.

Tout cela m'est revenu à l'esprit quand, tout récemment, j'ai lu la partie, publiée par le professeur Théodore Khoury (de Münster), du dialogue sur le christianisme et l'islam et sur leur vérité respective, que le savant empereur byzantin Manuel II Paléologue mena avec un érudit perse, sans doute en 1391 durant ses quartiers d’hiver à Ankara [1]. L'empereur transcrit probablement ce dialogue pendant le siège de Constantinople entre 1394 et 1402. Cela explique que ses propres réflexions sont rendues de manière plus détaillée que celles de son interlocuteur persan [2]. Le dialogue embrasse tout le domaine de la structure de la foi couvert par la Bible et le Coran ; il s'intéresse en particulier à l'image de Dieu et de l'homme, mais revient nécessairement sans cesse sur le rapport de ce qu'on appelait les « trois Lois » ou les « trois ordres de vie» : Ancien Testament – Nouveau Testament – Coran. Je ne voudrais pas en faire ici l'objet de cette conférence, mais relever seulement un point – au demeurant marginal dans l'ensemble du dialogue – qui m'a fasciné par rapport au thème ‘foi et raison’, et qui servira de point de départ de mes réflexions sur ce sujet.

Dans le septième entretien (διάλεξις – controverse) publié par le professeur Khoury, l'empereur en vient à parler du thème du djihad, de la guerre sainte. L'empereur savait certainement que, dans la sourate 2,256, on lit : pas de contrainte en matière de foi – c'est probablement l'une des plus anciennes sourates de la période initiale qui, nous dit une partie des spécialistes, remonte au temps où Mahomet lui-même était encore privé de pouvoir et menacé. Mais, naturellement, l'empereur connaissait aussi les dispositions – d'origine plus tardive – sur la guerre sainte, retenues par le Coran. Sans entrer dans des détails comme le traitement différent des « détenteurs d'Écritures » et des « infidèles », il s'adresse à son interlocuteur d'une manière étonnamment abrupte – abrupte au point d’être pour nous inacceptable –, qui nous surprend et pose tout simplement la question centrale du rapport entre religion et violence en général. Il dit : « Montre moi ce que Mahomet a apporté de nouveau et tu ne trouveras que du mauvais et de l'inhumain comme ceci, qu'il a prescrit de répandre par l'épée la foi qu'il prêchait » [3]. Après s'être prononcé de manière si peu amène, l'empereur explique minutieusement pourquoi la diffusion de la foi par la violence est contraire à la raison. Elle est contraire à la nature de Dieu et à la nature de l'âme. « Dieu ne prend pas plaisir au sang, dit-il, et ne pas agir selon la raison (‘σύν λόγω’) est contraire à la nature de Dieu. La foi est fruit de l'âme, non pas du corps. Celui qui veut conduire quelqu'un vers la foi doit être capable de parler et de penser de façon juste et non pas de recourir à la violence et à la menace... Pour convaincre une âme douée de raison, on n'a pas besoin de son bras, ni d'objets pour frapper, ni d'aucun autre moyen qui menace quelqu'un de mort... » [4].

L’affirmation décisive de cette argumentation contre la conversion par la force dit : « Ne pas agir selon la raison est contraire à la nature de Dieu » [5]. L'éditeur du texte, Théodore Khoury, commente à ce sujet: « Pour l'empereur, byzantin nourri de philosophie grecque, cette affirmation est évidente. Pour la doctrine musulmane, au contraire, Dieu est absolument transcendant. Sa volonté n'est liée à aucune de nos catégories, fût-ce celle qui consiste à être raisonnable ». [6] Khoury cite à ce propos un travail du célèbre islamologue français R. Arnaldez, qui note que Ibn Hazm va jusqu'à expliquer que Dieu n'est pas même tenu par sa propre parole et que rien ne l'oblige à nous révéler la vérité. Si tel était son vouloir, l'homme devrait être idolâtre [7].

À partir de là, pour la compréhension de Dieu et du même coup pour la réalisation concrète de la religion, apparaît un dilemme qui constitue un défi très immédiat. Est-ce seulement grec de penser qu'agir de façon contraire à la raison est en contradiction avec la nature de Dieu, ou cela vaut-il toujours et en soi ? Je pense que, sur ce point, la concordance parfaite, entre ce qui est grec, dans le meilleur sens du terme, et la foi en Dieu, fondée sur la Bible, devient manifeste. En référence au premier verset de la Genèse, premier verset de toute la Bible, Jean a ouvert le prologue de son évangile par ces mots : « Au commencement était le λογος». C'est exactement le mot employé par l'empereur. Dieu agit « σύν λόγω », avec logos.Logos désigne à la fois la raison et la parole – une raison qui est créatrice et capable de se communiquer, mais justement comme raison. Jean nous a ainsi fait don de la parole ultime de la notion biblique de Dieu, la parole par laquelle tous les chemins souvent difficiles et tortueux de la foi biblique parviennent à leur but et trouvent leur synthèse. Au commencement était le Logos et le Logos est Dieu, nous dit l'Évangéliste. La rencontre du message biblique et de la pensée grecque n'était pas le fait du hasard. La vision de saint Paul, à qui les chemins vers l'Asie se fermaient et qui ensuite vit un Macédonien lui apparaître et qui l'entendit l'appeler : « Passe en Macédoine et viens à notre secours » (cf. Ac 16, 6-10) – cette vision peut être interprétée comme un condensé du rapprochement, porté par une nécessité intrinsèque, entre la foi biblique et le questionnement grec.

En fait, ce mouvement de rapprochement mutuel était à l'œuvre depuis longtemps. Déjà, le nom mystérieux de Dieu lors de l’épisode du buisson ardent, qui distingue Dieu des divinités aux noms multiples et qui énonce simplement à son sujet le « Je suis », son être, est une contestation du mythe, qui trouve une analogie interne dans la tentative socratique de surmonter et de dépasser le mythe [8]. Le processus engagé au buisson ardent parvient à une nouvelle maturité, au cœur de l'Ancien Testament, pendant l'Exil, où le Dieu d'Israël, désormais sans pays et sans culte, se proclame le Dieu du ciel et de la terre et se présente dans une formule qui prolonge celle du buisson : « Je suis celui qui suis ». Avec cette nouvelle reconnaissance de Dieu s'opère, de proche en proche, une sorte de philosophie des Lumières, qui s'exprime de façon drastique dans la satire des divinités, qui ne seraient que des fabrications humaines (cf. Ps 115). C'est ainsi que la foi biblique, à l'époque hellénistique et malgré la rigueur de son opposition aux souverains grecs qui voulaient imposer par la force l'assimilation à leur mode de vie grec et au culte de leurs divinités, alla de l'intérieur à la rencontre de la pensée grecque en ce qu'elle avait de meilleur pour établir un contact mutuel, qui s'est ensuite réalisé dans la littérature sapientielle plus tardive. Nous savons aujourd'hui que la traduction grecque de l'Ancien Testament faite à Alexandrie – la Septante – est plus qu'une simple traduction du texte hébreu (à apprécier peut-être de façon pas très positive). Elle est un témoin textuel indépendant et une avancée importante de l'histoire de la Révélation. Cette rencontre s'est réalisée d'une manière qui a eu une importance décisive pour la naissance et la diffusion du christianisme [9]. Fondamentalement, il s'agit d'une rencontre entre la foi et la raison, entre l'authentique philosophie des Lumières et la religion. À partir de l'essence de la foi chrétienne et, en même temps, de la nature de la pensée grecque, qui avait fusionné avec la foi, Manuel II a pu vraiment dire : ne pas agir « avec leLogos » est en contradiction avec la nature de Dieu.

Pour être honnête, il faut noter ici que, à la fin du Moyen Âge, se sont développées, dans la théologie, des tendances qui ont fait éclater cette synthèse entre l’esprit grec et l’esprit chrétien. Face à ce qu'on appelle l'intellectualisme augustinien et thomiste, commença avec Duns Scot la théorie du volontarisme qui, dans ses développements ultérieurs, a conduit à dire que nous ne connaîtrions de Dieu que sa voluntas ordinata. Au-delà d'elle, il y aurait la liberté de Dieu, en vertu de laquelle il aurait aussi pu créer et faire le contraire de tout ce qu'il a fait. Ici se dessinent des positions qui peuvent être rapprochées de celles d'Ibn Hazm et tendre vers l'image d'un Dieu arbitraire, qui n'est pas non plus lié à la vérité ni au bien. La transcendance et l'altérité de Dieu sont placées si haut que même notre raison et notre sens du vrai et du bien ne sont plus un véritable miroir de Dieu, dont les possibilités abyssales, derrière ses décisions effectives, demeurent pour nous éternellement inaccessibles et cachées. À l'opposé, la foi de l'Église s'en est toujours tenue à la conviction qu'entre Dieu et nous, entre son esprit créateur éternel et notre raison créée, existe une réelle analogie, dans laquelle – comme le dit le IVe Concile du Latran, en 1215 – les dissimilitudes sont infiniment plus grandes que les similitudes, mais sans supprimer l'analogie et son langage. Dieu ne devient pas plus divin si nous le repoussons loin de nous dans un pur et impénétrable volontarisme, mais le Dieu véritablement divin est le Dieu qui s'est montré comme Logos et qui, comme Logos, a agi pour nous avec amour. Assurément, comme le dit Paul, l'amour « surpasse » la connaissance et il est capable de saisir plus que la seule pensée (cf. Ep 3, 19), mais il reste néanmoins l'amour du Dieu-Logos, ce pourquoi le culte chrétien est, comme le dit encore Paul, « λογική λατρεία », un culte qui est en harmonie avec la Parole éternelle et notre raison (cf. Rm 12, 1) [10].

Cet intime rapprochement mutuel ici évoqué, qui s'est réalisé entre la foi biblique et le questionnement philosophique grec, est un processus décisif non seulement du point de vue de l'histoire des religions mais aussi de l'histoire universelle, qui aujourd'hui encore nous oblige. Quand on considère cette rencontre, on ne s'étonne pas que le christianisme, tout en ayant ses origines et des développements importants en Orient, ait trouvé son empreinte décisive en Europe. À l'inverse, nous pouvons dire aussi : cette rencontre, à laquelle s'ajoute ensuite l'héritage de Rome, a créé l'Europe et reste le fondement de ce que, à juste titre, on appelle l’Europe.

La revendication de déshellénisation du christianisme, qui, depuis le début de l'époque moderne, domine de façon croissante le débat théologique, s'oppose à la thèse selon laquelle l'héritage grec, purifié de façon critique, appartient à la foi chrétienne. Si l'on y regarde de plus près, on peut observer que ce programme de déshellénisation a connu trois vagues, sans doute liées entre elles, mais qui divergent nettement dans leurs justifications et leurs buts[11].

La déshellénisation apparaît en relation avec les préoccupations de la Réforme du XVIesiècle. Étant donné la tradition des écoles théologiques, les réformateurs ont fait face à une systématisation de la foi, entièrement déterminée par la philosophie, pour ainsi dire une définition extérieure de la foi par une pensée qui n'émanait pas d'elle. De ce fait, la foi n'apparaissait plus comme une parole historique vivante, mais comme enfermée dans un système philosophique. Face à cela, la sola scriptura cherche la figure primitive de la foi, telle qu'elle se trouve à l'origine dans la Parole biblique. La métaphysique apparaît comme un présupposé venu d'ailleurs, dont il faut libérer la foi pour qu'elle puisse de nouveau redevenir pleinement elle-même. Avec une radicalité que les réformateurs ne pouvaient prévoir, Kant a agi à partir de ce programme en affirmant qu'il a dû mettre la pensée de côté pour pouvoir faire place à la foi. Du coup, il a ancré la foi exclusivement dans la raison pratique et il lui a dénié l'accès à la totalité de la réalité.

La théologie libérale des XIXe et XXe siècles a amené une deuxième vague dans ce programme de déshellénisation, dont Adolf von Harnack est un éminent représentant. Du temps de mes études, tout comme durant les premières années de mon activité universitaire, ce programme était aussi fortement à l’œuvre dans la théologie catholique. La distinction de Pascal entre le Dieu des philosophes et le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob servait de point de départ. Dans ma leçon inaugurale à Bonn en 1959, j'ai essayé de m'y confronter et je ne voudrais pas reprendre de nouveau tout cela ici [12]. Mais je voudrais essayer, au moins très brièvement, de mettre en lumière l'aspect nouveau qui distingue cette deuxième vague de déshellénisation. L'idée centrale qui apparaît chez Harnack est le retour à Jésus simple homme et à son message simple, qui serait antérieur à toutes les théologisations et aussi à toutes les hellénisations. Ce message simple représenterait le véritable sommet de l'évolution religieuse de l'humanité. Jésus aurait congédié le culte au bénéfice de la morale. En définitive, on le représente comme le père d'un message moral philanthropique. Le souci de Harnack est au fond de mettre le christianisme en harmonie avec la raison moderne, précisément en le libérant d'éléments apparemment philosophiques et théologiques comme, par exemple, la foi en la divinité du Christ et en la Trinité de Dieu. En ce sens, l'exégèse historico-critique du Nouveau Testament, telle qu'il la voyait, réintègre de nouveau la théologie dans le système de l'Université. Pour Harnack, la théologie est essentiellement historique et, de ce fait, rigoureusement scientifique. Ce qu'elle découvre de Jésus par la voie critique est pour ainsi dire l'expression de la raison pratique. Du même coup, elle a sa place justifiée dans le système de l'Université. En arrière plan, on perçoit l'autolimitation moderne de la raison, qui a trouvé son expression classique dans les Critiques de Kant, mais qui, entre-temps encore, a été radicalisée par la pensée des sciences de la nature. Cette conception moderne de la raison, pour le dire en raccourci, repose sur une synthèse entre le platonisme (cartésianisme) et l'empirisme, confirmée par le progrès technique. D'une part, on présuppose la structure mathématique de la matière, pour ainsi dire, sa rationalité interne, qui permet de la comprendre et de l'utiliser dans sa forme efficiente. Ce présupposé est en quelque sorte l'élément platonicien de la compréhension moderne de la nature. D'autre part, pour nos intérêts, il y va de la fonctionnalité de la nature, où seule la possibilité de la vérification ou de la falsification par l’expérience décide de la certitude. Selon les cas, le poids entre les deux pôles peut se trouver davantage d'un côté ou de l'autre. Un penseur aussi rigoureusement positiviste que Jacques Monod s'est déclaré platonicien convaincu.

Pour notre question, cela entraîne deux orientations décisives. Seule la forme de certitude, résultant de la combinaison des mathématiques et des données empiriques, autorise à parler de scientificité. Ce qui a la prétention d'être science doit se confronter à ce critère. Ainsi, les sciences relatives aux choses humaines comme l'histoire, la psychologie, la sociologie, la philosophie, ont tenté de se rapprocher de ce canon de la scientificité. Mais pour nos réflexions, il est en outre important que la méthode en tant que telle exclue la question de Dieu et la fasse apparaître comme une question non-scientifique ou préscientifique. Mais, de ce fait, nous nous trouvons devant une réduction du rayon de la science et de la raison, qu'il faut mettre en question.

Je reviendrai encore sur ce point. Pour l'instant, il faut d'abord constater que, conduite dans cette perspective, toute tentative visant à ne conserver à la théologie que son caractère de discipline « scientifique » ne garde du christianisme qu'un misérable fragment. Il nous faut aller plus loin : si la science dans son ensemble n'est que cela, l'homme lui-même s'en trouve réduit. Car les interrogations proprement humaines, «d'où venons-nous», « où allons-nous», les questions de la religion et de l'éthique, ne peuvent alors trouver place dans l'espace de la raison commune, délimitée par la « science » ainsi comprise, et doivent être renvoyées au domaine de la subjectivité. Au nom de ses expériences, le sujet décide ce qui lui semble acceptable d'un point de vue religieux, et la « conscience » subjective devient, en définitive, l'unique instance éthique. Cependant, l'éthique et la religion perdent ainsi leur force de construire une communauté et tombent dans l'arbitraire. Cette situation est dangereuse pour l'humanité. Nous le constatons bien avec les pathologies de la religion et de la raison, qui nous menacent et qui doivent éclater nécessairement là où la raison est si réduite que les questions de la religion et de la morale ne la concernent plus. Ce qui nous reste de tentatives éthiques fondées sur les lois de l'évolution ou de la psychologie et de la sociologie est tout simplement insuffisant.

Avant de parvenir aux conclusions auxquelles tend ce raisonnement, il me faut encore évoquer brièvement la troisième vague de déshellénisation, qui a cours actuellement. Au regard de la rencontre avec la pluralité des cultures, on dit volontiers aujourd'hui que la synthèse avec l'hellénisme, qui s'est opérée dans l'Église antique, était une première inculturation du christianisme qu'il ne faudrait pas imposer aux autres cultures. Il faut leur reconnaître le droit de remonter en deçà de cette inculturation vers le simple message du Nouveau Testament, pour l'inculturer à nouveau dans leurs espaces respectifs. Cette thèse n'est pas simplement erronée mais encore grossière et inexacte. Car le Nouveau Testament est écrit en grec et porte en lui-même le contact avec l'esprit grec, qui avait mûri précédemment dans l'évolution de l'Ancien Testament. Certes, il existe des strates dans le processus d'évolution de l'Église antique qu'il n'est pas besoin de faire entrer dans toutes les cultures. Mais les décisions fondamentales, qui concernent précisément le lien de la foi avec la recherche de la raison humaine, font partie de la foi elle-même et constituent des développements qui sont conformes à sa nature.

J'en arrive ainsi à la conclusion. L'essai d'autocritique de la raison moderne esquissé ici à très gros traits n'inclut d'aucune façon l'idée qu'il faille remonter en deçà des Lumières (Aufklärung) et rejeter les intuitions de l'époque moderne. Nous reconnaissons sans réserve la grandeur du développement moderne de l'esprit. Nous sommes tous reconnaissants pour les vastes possibilités qu'elle a ouvertes à l'homme et pour les progrès en humanité qu'elle nous a donnés. L'éthique de la scientificité – vous y avez fait allusion M. le Recteur magnifique – est par ailleurs volonté d'obéissance à la vérité et, en ce sens, expression d'une attitude fondamentale qui fait partie des décisions essentielles de l'esprit chrétien. Il n'est pas question de recul ni de critique négative, mais d'élargissement de notre conception et de notre usage de la raison. Car, tout en nous réjouissant beaucoup des possibilités de l'homme, nous voyons aussi les menaces qui surgissent de ces possibilités et nous devons nous demander comment les maîtriser. Nous ne le pouvons que si foi et raison se retrouvent d'une manière nouvelle, si nous surmontons la limitation autodécrétée de la raison à ce qui est susceptible de falsification dans l'expérience et si nous ouvrons de nouveau à la raison tout son espace. Dans ce sens, la théologie, non seulement comme discipline d'histoire et de science humaine, mais spécifiquement comme théologie, comme questionnement sur la raison de la foi, doit avoir sa place dans l'Université et dans son large dialogue des sciences.

C'est ainsi seulement que nous devenons capables d'un véritable dialogue des cultures et des religions, dont nous avons un besoin si urgent. Dans le monde occidental domine largement l'opinion que seule la raison positiviste et les formes de philosophie qui s'y rattachent seraient universelles. Mais les cultures profondément religieuses du monde voient cette exclusion du divin de l'universalité de la raison comme un outrage à leurs convictions les plus intimes. Une raison qui reste sourde au divin et repousse la religion dans le domaine des sous-cultures est inapte au dialogue des cultures. En cela, comme j'ai essayé de le montrer, la raison des sciences modernes de la nature, avec l'élément platonicien qui l'habite, porte en elle une question qui la transcende, ainsi que ses possibilités méthodologiques. Elle doit tout simplement accepter comme un donné la structure rationnelle de la matière tout comme la correspondance entre notre esprit et les structures qui régissent la nature : son parcours méthodologique est fondé sur ce donné. Mais la question « pourquoi en est-il ainsi ? » demeure. Les sciences de la nature doivent l'élever à d'autres niveaux et à d'autres façons de penser – à la philosophie et à la théologie. Pour la philosophie et, d'une autre façon, pour la théologie, écouter les grandes expériences et les grandes intuitions des traditions religieuses de l'humanité, mais spécialement de la foi chrétienne, est une source de connaissance à laquelle se refuser serait une réduction de notre faculté d'entendre et de trouver des réponses. Il me vient ici à l'esprit un mot de Socrate à Phédon. Dans les dialogues précédents, beaucoup d'opinions philosophiques erronées avaient été traitées, maintenant Socrate dit : « On comprendrait aisément que, par dépit devant tant de choses fausses, quelqu'un en vienne à haïr et à mépriser tous les discours sur l'être pour le reste de sa vie. Mais de cette façon, il se priverait de la vérité de l'être et pâtirait d'un grand dommage » [13].Depuis longtemps, l'Occident est menacé par cette aversion pour les interrogations fondamentales de la raison et il ne pourrait qu'en subir un grand dommage. Le courage de s'ouvrir à l'ampleur de la raison et non de nier sa grandeur – tel est le programme qu'une théologie se sachant engagée envers la foi biblique doit assumer dans le débat présent. « Ne pas agir selon la raison, ne pas agir avec le Logos, est en contradiction avec la nature de Dieu » a dit Manuel II à son interlocuteur persan, en se fondant sur sa vision chrétienne de Dieu. Dans ce grand Logos, dans cette amplitude de la raison, nous invitons nos interlocuteurs au dialogue des cultures. La retrouver nous-mêmes toujours à nouveau est la grande tâche de l'Université.


[1] De l’ensemble des 26 colloques (διάλεξις – Khoury traduit controverse) du dialogue (« Entretien »), Th. Khoury a publié la 7e « controverse » avec des notes et une large introduction sur l’origine du texte, sur la tradition manuscrite et sur la structure du dialogue, ainsi que de brefs résumés des « controverses » non éditées ; au texte grec est associée une traduction française : Manuel II Paléologue « Entretiens avec un Musulman. 7econtroverse » : SC 115, Paris, 1966. De plus, Karl Förstel a publié dans le Corpus Islamico-Christianum (Série grecque, Rédaction A. Th. Khoury – R. Glei) une édition commentée du texte, grec-allemand: Manuel II Paléologue, Dialogue avec un Musulman, 3 vol., Würzburg – Altenberge, 1993-1996. Déjà en 1966, E. Trapp avait publié le texte grec – avec une introduction – comme deuxième volume de « Wiener byzantinischen Studien ». Je citerai par la suite selon Khoury.

[2] Sur l’origine et la rédaction du dialogue, cf. Khoury pp. 22-29 ; on trouve aussi de larges commentaires à ce sujet dans les éditions Förstel et Trapp.

[3] Controverse VII, 2c : Khoury, pp. 142-143 ; Förstel, vol. I, VII, Dialogue 1.5, pp. 240-241. Dans le monde musulman cette citation a été malheureusement considérée comme une expression de ma position personnelle et elle a de ce fait suscité une indignation compréhensible. Je souhaite que le lecteur de mon texte puisse comprendre rapidement que cette phrase n’exprime pas mon jugement personnel sur le Coran, envers lequel j’ai le respect dû au livre sacré d’une grande religion. Avec la citation du texte de l’empereur Manuel II, j’entendais seulement mettre en évidence le rapport essentiel entre foi et raison. Sur ce point, je suis d’accord avec Manuel II, sans pour autant faire mienne la polémique.

[4] Controverse, VII 3b – c : Khoury, pp. 144-145 ; Förstel, vol. I, VII Dialogue 1.6 pp. 240-243.

[5] C’est seulement pour cette affirmation que j’ai cité le dialogue entre Manuel II et son interlocuteur persan. C’est là qu’apparaît le thème des réflexions qui suivent.

[6] Cf. Khoury, op. cit. p. 144, n. 1.

[7] R. Arnaldez, Grammaire et théologie chez Ibn Hazm de Cordoue, Paris, 1956, p. 13 ; cf. Khoury p. 144. Le fait que, dans la théologie du Moyen-Âge tardif, il existe des positions comparables apparaîtra dans le développement ultérieur de mon discours.

[8] Pour l’interprétation largement discutée de l’épisode du buisson ardent, je voudrais renvoyer à mon livre Einführung in das Christentum (Munich, 1968), pp. 84-102. Je pense que, dans ce livre, mes affirmations restent encore valables, malgré les développements ultérieurs du débat.

[9] Cf. A. Schenker : l’Écriture sainte subsiste en plusieurs formes canoniques simultanées :L’interpretazione della Bibbia nella Chiesa. Atti del Simposio promosso dalla Congregazione per la Dottrina della Fede, Città del Vaticano, 2001, pp. 178-186.

[10] Sur cette question je me suis exprimé de manière plus détaillée dans mon livre Der Geist der Liturgie. Eine Einführung, Freiburg 2000, 38-42.

[11] De l’importante littérature sur le thème de la deshellénisation, je voudrais d’abord mentionner A. Grillmeier, Hellenisierung – Judaisierung des Christentums als Deuteprinzipien der Geschichte des kirchlichen Dogmas : Id., Mit ihm und in ihm. Christologische Forschungen und Perspektiven, Freiburg, 1975, pp. 423-488.

[12] Publié et commenté récemment par Heino Sonnemanns: Joseph Ratzinger – Benedikt XVI, Der Gott des Glaubens und der Gott der Philosophen. Ein Beitrag zum Problem der theologia naturalis. Johannes-Verlag Leutesdorf, 2 ergänzte Auflage, 2005.

[13] 90c-d. Pour ce texte, cf. R. Guardini, Der Tod des Sokrates. Mainz-Paderborn, 19875, pp. 218-221.

source: vatican

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Islam : la voix prophétique (et méprisée) de Benoît XVI à Ratisbonne (@Aleteia - 16 sept 2014)

Au Caire le discours de Ratisbonne retrouve son actualité (chiesa.espresso.repubblica.it)

Discours de Ratisbonne (wikipedia)

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DÉCLARATION DU CARDINAL TARCISIO BERTONE, S.D.B.,
SECRETAIRE D'ETAT

Samedi 16 septembre 2006


Face aux réactions du monde musulman à propos de certains passages du discours du Saint-Père Benoît XVI à l'Université de Ratisbonne, je souhaite ajouter ce qui suit aux explications et aux précisions déjà apportées par l'intermédiaire du Directeur de la Salle de Presse du Saint-Siège:

- La position du Pape sur l'Islam est, sans équivoque, celle qui est exprimée dans le document conciliaire Nostra Aetate: "L'Eglise regarde avec estime les musulmans qui adorent le Dieu un, vivant et subsistant, miséricordieux et tout puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes. Ils cherchent à se soumettre de toute leur âme aux décrets de Dieu, même s'ils sont cachés, comme s'est soumis à Dieu Abraham, auquel la foi islamique se réfère volontiers. Bien qu'ils ne reconnaissent pas Jésus comme Dieu, ils le vénèrent comme prophète; ils honorent sa Mère virginale, Marie, et parfois même l'invoquent à piété. De plus ils attendent le jour du jugement où Dieu rétribuera tous les hommes ressuscités. Aussi ont-ils en estime la vie morale et rendent-ils un culte à Dieu, surtout par la prière, l'aumône et le jeûne" (n. 3).

- Le choix du Pape en faveur du dialogue interreligieux et interculturel est lui aussi sans équivoque. Lors de la rencontre avec les représentants de plusieurs communautés musulmanes à Cologne, le 20 août 2005, il a affirmé que ce dialogue entre chrétiens et musulmans "ne peut pas se réduire à un choix passager", en ajoutant: "Les leçons du passé doivent nous servir à éviter de répéter les mêmes erreurs. Nous voulons rechercher les voies de la réconciliation et apprendre à vivre en respectant chacun l'identité de l'autre".

- Quant au jugement de l'empereur byzantin Manuel II Paléologue, qu'il a cité dans son discours de Ratisbonne, le Saint-Père n'a pas entendu et n'entend absolument pas le faire sien, mais il l'a seulement utilisé comme une occasion pour développer, dans un contexte universitaire et selon ce qui apparaît après une lecture complète et attentive du texte, certaines réflexions sur le thème du rapport entre religion et violence en général et conclure àun refus clair et radical de la motivation religieuse de la violence, de quelque côté qu'elle provienne. Il vaut la peine de rappeler à cet égard ce que Benoît XVI a lui-même affirmé dans le message commémoratif du XX anniversaire de la rencontre interreligieuse de prière pour la paix voulue par son bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II à Assise en octobre 1986: "... les manifestations de violence ne peuvent pas être attribuées à la religion en tant que telle, mais aux limites culturelles dans lesquelles elle est vécue et se développe dans le temps... En effet, des témoignages du lien intime qui existe entre le rapport avec Dieu et l'éthique de l'amour sont visibles dans toutes les grandes traditions religieuses".

- Le Saint-Père est donc vivement désolé que certains passages de son discours aient pu apparaître comme portant offense à la sensibilité des croyants musulmans et aient été interprétés d'une manière absolument non conforme à ses intentions. D'autre part, face à la religiosité fervente des croyants musulmans, il a mis en garde la culture occidentale afin qu'elle évite "le mépris de Dieu et le cynisme qui considère la dérision du sacré comme un droit de la liberté".

- En réaffirmant son respect et son estime pour tous ceux qui professent l'islam, il forme le vœu que ceux-ci soient aidés à comprendre ses paroles dans leur juste signification, afin que, une fois dépassé au plus tôt ce moment difficile, se renforce le témoignage rendu au "Dieu un, vivant et subsistant, miséricordieux et tout puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes" et la collaboration en vue de "protéger et promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté" (Nostra Aetate, n. 3).

source: vatican

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Benoit XVI au Palais apostolique de Castelgandolfo le Dimanche 17 septembre 2006

"....En ce moment, je désire seulement ajouter que je suis vivement attristé par les réactions suscitées par un bref passage de mon discours à l'Université de Ratisbonne, considéré comme offensant pour la sensibilité des croyants musulmans, alors qu'il s'agissait d'une citation d'un texte médiéval, qui n'exprime en aucune manière ma pensée personnelle. Hier, Monsieur le Cardinal Secrétaire d'Etat a rendu publique, à ce sujet, une déclaration dans laquelle il a expliqué le sens authentique de mes paroles. J'espère que cela contribuera à apaiser les esprits et à clarifier le sens véritable de mon discours, qui, dans son ensemble, était et est une invitation au dialogue franc et sincère, avec un grand respect réciproque. Tel est le sens de mon discours...."

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Benoit XVI lors de l'AUDIENCE GÉNÉRALE du Mercredi 20 septembre 2006

Une expérience particulièrement belle a été pour moi, ce jour-là, de prononcer un discours devant un grand auditoire de professeurs et d'étudiants de l'Université de Ratisbonne, où j'ai enseigné comme professeur pendant de nombreuses années. J'ai pu rencontrer encore une fois avec joie le monde universitaire qui, pendant une longue période de ma vie, a été ma patrie spirituelle. J'avais choisi pour thème la question du rapport entre foi et raison. Pour présenter à l'auditoire le caractère dramatique et actuel du thème, j'ai cité quelques paroles d'un dialogue chrétien-musulman du XIV siècle, avec lesquelles l'interlocuteur chrétien, l'empereur byzantin Manuel II Paléologue - d'une manière pour nous étonnamment abrupte - présenta à son interlocuteur musulman le problème du rapport entre la religion et la violence. Cette citation a malheureusement pu se prêter à un malentendu. Pour un lecteur attentif de mon texte, il apparaît cependant clairement que je ne voulais en aucune façon faire miennes les paroles négatives prononcées par l'empereur médiéval dans ce dialogue et que leur contenu polémique n'exprime pas ma conviction personnelle. Mon intention était bien différente: en partant de ce que Manuel II dit ensuite de manière positive, avec une très belle phrase, à propos de la raison qui doit guider dans la transmission de la foi, je voulais expliquer que ce n'est pas la religion et la violence, mais la religion et la raison qui vont de pair. Le thème de ma conférence - répondant à la mission de l'Université - fut donc la relation entre la foi et la raison: je voulais inviter au dialogue de la foi chrétienne avec le monde moderne et au dialogue de toutes les cultures et religions. J'espère qu'en divers moments de ma visite - par exemple, lorsque j'ai souligné à Munich combien il est important de respecter ce qui est sacré pour les autres - est apparu clairement mon profond respect pour les grandes religions et, en particulier, pour les musulmans, qui "adorent le Dieu unique" et avec lesquels nous sommes engagés à "protéger et à promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté" (Nostra Aetate, n. 3). Je suis donc certain que, après les réactions du premier moment, mes paroles à l'Université de Ratisbonne pourront constituer une impulsion et un encouragement à un dialogue positif, même autocritique, que ce soit entre les religions ou entre la raison moderne et la foi des chrétiens.



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( Quelle société voulons nous ? (Cardinal André XXIII ) - Partie I)
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